Je veux te rendre hommage, à toi, ma Steph, mon amie de fac avec qui j’ai partagé le quotidien au FJT de Rodez pendant 2 ans, présente aux moments forts de ma vie.
Quelle joie d’avoir la visite surprise de mon poupi et de son papa lundi soir à 18h à l’école, hélas la joie se dissipe rapidement quand ce dernier m’annonce qu’il vient m’apprendre une très mauvaise nouvelle : tu t’es tuée ce week-end en voiture.
Je reste sans réaction …. Puis, je commence à réaliser…pas toi, pas ma Steph de Millau rigolote et pleine de vie…..Mais comment est-ce arrivé ? Ils ne savent pas trop encore, une enquête à été ouverte, ils ne comprennent pas, tu étais sur une ligne droite, aucune raison pour que tu quittes la route et pourtant tu as perdu le contrôle de ton véhicule, ta voiture a percuté un arbre, ta ceinture s’est brisé, tu as été éjectée ….
Mais je ne veux toujours pas y croire, ce n’est pas possible, elle a 27 ans, elle est au commencement de sa vie, elle a tellement de choses à vivre…
Et puis ses parents ils ne peuvent pas enterrer leur fille, les enfants ne doivent pas partir avant leurs parents c’est n’importe quoi, c’est profondément injuste, c’est inhumain.
Tes funérailles ont lieu le lendemain.
A la maison nous faisons comme si rien ne s’était passé devant le bibou. Dans le lit je tente de trouver le sommeil. Je m’endors enfin. Au réveil j’imagine que tout cela n’était qu’un mauvais cauchemar, que tu es bien vivante et que tu petit-dejeunes comme nous. Mais la réalité me rappelle, il faut que j’appelle l’inspection académique pour demander ma demi-journée et Fred sa société pour en faire de même.
A l’école, je l’annonce à mes collègues qui sont aussi désemparés que moi, mes élèves eux, me demandent des détails sur toi, et quand ils apprennent que tu avais juste 27 ans, ils trouvent que c’est jeune pour mourir. Heureusement grâce à mes 24 schtroumpfs je n’ai pas le temps de penser, ce matin évaluation de piscine et préparation de dictée et pas une minute pour penser à autre chose.
A midi Fred passe me prendre. Dans la voiture je somnole, je ne réalise toujours pas que je vais à ton enterrement. Nous courons dans les rues de Millau à la recherche de l’église du Sacré Cœur….mais en nous rapprochant je vois, horrifiée les fourgons noirs des pompes funèbres. Je m’arrête, je ne peux pas faire un pas de plus, je réalise maintenant que tu es sans vie dans un cercueil. J’explose, mes larmes coulent. Je me reprends, il faut que je rentre dans l’église, il faut que je te rende un dernier hommage. La bâtisse est bondée, tant de gens sont là pour toi…je me console en me disant « c’est déjà ca »….
Et là mon chagrin reprend de plus belle quand je vois deux posters de toi sur l’autel, c’est bien toi ma Steph là-bas, gaie et souriante.
Puis ton papa entame la cérémonie, il a si bien dit les choses, il espérait tant se retrouver dans cette église, devant cet autel avec toi à son bras et aujourd’hui devant cet autel il y est mais seul et désemparé.
De la cérémonie je n’ai pas retenu grand-chose, tu le sais bien moi, toutes ces choses sur Dieu, Marie, la résurrection, la vie par delà la mort je n’y crois pas, les textes religieux ne me touchent pas et même plus, il m’agace, on est là pour rendre hommage à toi ma Steph pas à ce Dieu qui t’a sois disant rappelé à lui.
Cependant, je me souviendrai toujours des paroles du prêtre au cours de l’homélie « c’est injuste, c’est pas naturel, c’est pas dans l’ordre des choses, c’est révoltant et décourageant….c’est déguelasse….. ».
Les paroles de Serge, ton compagnon, m’ont aussi très émue, il regrettait de ne pas t’avoir assez choyé, assez gaté, il se reprochait de n’avoir pas pris assez soin de toi, pas autant que tu le méritais…
A la fin de la célébration, je me suis approchée de ton cercueil pour te dire adieu mais je n’ai pas pu poser ma main dessus, tout serait devenu bien trop réel si j’avais effleuré l’endroit où tu reposeras maintenant et à jamais. C’était tellement bouleversant d’être à quelques centimètres de cette chose dont tu ne sortirais plus, et puis ces photos de toi, ces 27 bougies allumées, cette musique…j’avais envie de hurler et m’enfuir en même temps.
Enfin, il a bien fallu t’amener dans ce cimetière pour que tu reposes avec les tiens.
Après l’installation à la fois macabre et émouvante du cercueil dans le fourgon, nous avons fait quelques pas jusqu’au cimetière. Certains restaient silencieux plongés encore dans l’incompréhension de la situation, d’autres parlaient de tout et de rien pour nous rappeler qu’il fallait continuer à vivre.
Au cimetière, plein de larmes, nous avons jeté une rose blanche sur ton cercueil.
Dans la voiture nous nous sommes échangés à peine quelques mots, nous n’avions pas envie de faire comme si tout cela était derrière nous et que tout allait bien.
Non ! Tout n’allait pas bien ! Aujourd’hui mardi 10 juin à 14h30, nous avons enterré une jeune fille de 27 ans.
A la maison, nous avons décidé d’allumer tous les soirs une bougie avec une photo de toi en train de lire un texte dans l’église de Saint Jean lors de mon mariage.
Le bibou ne comprend pas bien, il se demande qui est cette dame sur la photo, je lui réponds simplement que c’est Stéphanie, qu’elle t’a tenu dans les bras, qu’elle t’a offert cette gravure que nous avons fixé sur la porte de ta chambre. Plus tard nous lui dirons que c’était Stéphanie quand il sera capable de comprendre et quand nous serons nous même capable d’accepter la réalité.
A Stéphanie Levaufre (1980-2008).
11 juin 2008
A Steph
Exceptionnellement, ce blog qui se veut désinvolte et drôle va prendre un ton triste et funèbre parce que parfois la vie fait que tout n’est pas légèreté et bonheur